Édith Maruéjouls, chercheuse en géographie du genre et spécialiste des questions d’égalité dans l’espace public, propose dans ce webinaire des pistes de réflexion pour créer des espaces destinés à rétablir la mixité dans les cours d’école et où filles et garçons soient à nouveau en relation.

Méthodes d’étude des dynamiques présentes dans les cours d’écoles

Les propositions de la chercheuse s’appuient sur un travail de terrain approfondi, qu’elle réalise en immersion durant plusieurs mois dans des écoles et collèges, auprès des enfants et du personnel éducatif. Sa manière d’aborder le terrain se fonde sur le « paradigme féministe », lui-même basé sur le constat des « stéréotypes de sexe » et de la hiérarchisation qu’ils induisent entre filles et garçons.  Édith M. observe que les stéréotypes s’instaurent très tôt à partir d’une classification par la tenue vestimentaire. L’enjeu consiste alors à « ramener » les garçons vers le groupe des filles.
En effet, les jeunes garçons sont très vite amenés à s’identifier par opposition aux filles, entraînant une dévalorisation de ces dernières. Les expériences menées avec les enfants montrent que ce sont les jeux proposés par les filles dans l’espace central, qu’elles sont invitées à se ré-approprier, qui va permettre la mixité.

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Le rôle des adultes

Dans ce contexte, la vigilance de la communauté éducative doit consister à rappeler régulièrement le droit. Etre égaux signifie avoir les mêmes droits.  Réhabiliter l’égalité dans la relation quotidienne auprès des enfants implique que « tout le monde a le droit de jouer », ce en partageant l’espace. Le mélange des enfants dans la cour passe de ce fait par le rétablissement d’une mobilité pour les filles. On observe d’ailleurs que la possibilité d’entretenir des amitiés entre filles et garçons s’avère le meilleur rempart contre l’apparition de violences à l’adolescence et l’âge adulte.

Traduction dans l’aménagement des espaces

De manière concrète, c’est en créant des ambiances, plutôt qu’en assignant des usages précis aux différents espaces, que les enfants vont pouvoir se rencontrer, entre filles et garçons, de même qu’entre petits et grands et diversifier leurs jeux. La chercheuse recommande ainsi de laisser le plus de place possible à l’auto-organisation des enfants.

Cela peut se traduire par la création d’espaces intermédiaires pour la lecture et les jeux de société, ou encore l’aménagement d’espaces de grands jeux modulables et négociables. Légitimer et externaliser les activités des filles va de même autoriser les garçons à y participer (« quand il fait beau, on peut aussi faire « perles » dehors ! ») et redonner du choix à ces derniers, au-delà de l’incontournable jeu de ballons.

La chercheuse conclue en rappelant que la cour d’école est par excellence l’espace d’apprentissage de la relation à l’autre : l’enjeu du rétablissement d’une égalité pratique et concrète dans les jeux dès le plus jeune âge s’avère donc particulièrement massif.
Si les valeurs de liberté et d’égalité sont bien présentes chez les enfants, la « norme » qui s’impose rapidement à eux, hiérarchisant leurs relations, doit impérativement être bouleversée.