Emmanuel Roehrig est responsable périscolaire de site du groupe scolaire de la Niederau dans le quartier de la Robertsau à Strasbourg. Il témoigne des changements qu’il a pu observer depuis la transformation des cours avec la démarche OASIS.

Emmanuel, pouvez-vous nous raconter votre parcours professionnel ?

J’ai commencé par faire un bac pro de comptabilité. Mais comme je suis quelqu’un d’actif, rester assis à un bureau, ce n’était pas trop fait pour moi… Donc je me suis tourné vers l’animation. J’ai travaillé durant cinq ans en tant qu’emploi jeune à l’école de la Wantzenau et j’en ai profité pour me former. Après le BAFA et le BAFD, j’ai eu la chance de faire un DUAPS (diplôme universitaire des activités périscolaires), équivalent à une licence et enfin un DHEPS (Diplôme des Hautes Etudes des Pratiques Sociales). En 2007, j’ai eu une première offre d’emploi de quatre mois à la Robertsau, en tant que chargé d’organisation des activités périscolaires. Puis j’ai enchaîné avec toutes sortes de missions sur le territoire de Strasbourg, avant de revenir en 2009 sur le territoire de la Robertsau, où je suis toujours aujourd’hui. En 2016, nous sommes passés « responsables périscolaires de sites » avec davantage de missions : gestion des ATSEM, des animateurs titulaires et vacataires. Je gère le site des écoles de la Niederau, des écoles Branly….

A côté de mon activité professionnelle, je suis entraîneur et arbitre en handball, un sport que je pratique depuis mon enfance. Je suis enfin papa d’un garçon.

Emmanuel Roehrig apprécie particulièrement le plateau sportif, jouxtant un espace potager ouvert par un beau portique en bois.

Vous avez l’air de beaucoup aimer votre travail…

Oui, j’apprécie vraiment le côté relationnel, avec les équipes, avec les directions d’écoles. A Niederau, il y a une très bonne ambiance. C’est une école vivante, avec beaucoup de demandes des parents, mais aussi une bonne reconnaissance. Je me sens vraiment bien dans mon travail, grâce à l’entente entre nous, aux échanges, à la cohésion : on gère tous ensemble les problèmes. Je salue tout le travail des animateurs, qui sont très investis (nous avons au total à Niederau neuf ATSEM et une apprentie, quatre animateurs titulaires et vingt-six vacataires.) Je n’aime pas m’ennuyer, ni que ce soit répétitif. Et dans ce métier-là, on arrive le matin et la journée ne se déroule pas toujours comme prévu, plein de choses se passent !

L’école maternelle dispose de deux cours. Les enfants se répartissent harmonieusement dans l’espace, grâce à la diversité des aménagements et zones de jeux.

Pouvez-vous me raconter quel genre d’élève vous étiez, étant enfant ?

J’ai grandi à Hoerdt, mon village natal, où tout le monde se connaissait. J’étais un élève très timide, je ne parlais pas beaucoup. Mon centre d’intérêt, c’était clairement le sport. J’aimais aussi bien rendre service, être à l’écoute des autres… Je n’étais pas un très bon élève et au collège, j’ai redoublé la 6e et la 3e ! Au lycée, je suis allé en internat à Barr. Je ne savais pas trop où aller… alors je me suis engagé dans la compta, car j’étais bon en maths.

Quel est votre souvenir des cours d’école en tant qu’élève ?

A Hoerdt, la cour de l’école était plutôt petite, bétonnée, sans aucun traçage. On jouait au ballon, aux billes. Pour courir, on devait se rendre dans une petite rue perpendiculaire, bien droite, sans circulation ou aller à pied au complexe sportif. C’était très différent de la cour actuelle de l’école Niederau, je ne me souviens pas de structures de jeux par exemple. Mais je n’en garde que de bons souvenirs. On ne s’ennuyait pas, il y avait les échanges avec les copains, on parlait de tout et de rien… On était contents d’être en récré, les enseignants étaient un peu plus stricts à l’époque !

Venons-en à présent à la transformation des cours du groupe scolaire Niederau… pour commencer, comment avez-vous vécu la phase de concertation ?

La concertation s’est très bien passée à Niederau ! Au départ, quand on nous a annoncé le nombre de réunions, on s’est demandé pourquoi on devait en faire autant… C’est vrai que c’est un investissement, mais c’était bien structuré, on a bien avancé au fur et à mesure et quand on est arrivé au bout, on ne s’en était pas rendu compte ! On a été très bien accompagnés par notre facilitatrice, Elodie Cordier. Elle était très investie et a beaucoup apprécié aussi de travailler avec nous. C’était un sacré projet dans notre groupe scolaire : on a quatre cours, avec un gymnase, on se demandait comment on pourrait organiser tout cela. Chacun a pu donner ses idées. Parfois on rigolait bien, parfois on était bien concentrés sur le sujet. On est très contents : les réunions nous ont donné tous les éléments pour bien construire notre projet.

Vous avez connu les cours avant leur végétalisation et maintenant vous travaillez dans des cours complètement transformées. Avec le recul, comment appréciez-vous cette évolution ?

Au départ, c’était gris… Ce qui manquait tout simplement, c’était des tables, des endroits pour se poser. Maintenant, la couleur du sol a changé, ce n’est plus plat, il y a des espaces où les enfants peuvent monter, observer. Il y a des coins lectures, des petits bancs avec des buissons, un espace avec une table de ping-pong, un échiquier géant, un espace « molky ». Les enfants trouvent plus de repères où se sentir bien. La cour revit !

Grâce au plateau sportif, il y a à présent une séparation entre les espaces calmes et les activités sportives et les jeux de ballon. Même là, l’estrade permet aux enfants de s’asseoir et se reposer durant les jeux collectifs.

La cour de l’école élémentaire présente des revêtements diversifiés, un bac à sable ouvert, un amphithéâtre, une petite butte assortie de marches et des zones végétalisées

Et à la Maternelle ?

Dans les deux cours de la maternelle, il y a des espaces où les enfants peuvent s’asseoir, avec des tables et assises à leur taille, un espace de lecture. Il y a une zone spéciale pour les vélos, un toboggan, une structure de grimpe. L’enfant peut s’épanouir, il a le choix de ses activités. Les enfants apprécient leur nouvelle cour, ils ont les yeux partout ! Nous avons aussi un espace jardin à l’arrière : les ATSEM s’y rendent le midi pour entretenir leur propre carré potager. La cour sert aujourd’hui à davantage qu’à de la récréation. On peut donner aux enfants plus de liberté, plus de choses à faire.

Avez-vous eu des déceptions au moment de la livraison de la cour ?

On pestait un peut avec le mulch au début, mais maintenant on en plaisante, même les parents ! Les enfants ramènent du mulch chez eux, on en retrouve dans les poches…

Des règles ont été mises en place concernant l’usage du mulch… plus faciles à faire respecter en élémentaire qu’en maternelle !

90 % de la cour correspond à ce qu’on avait demandé. On avait souhaité quelques aménagements qui n’ont pas pu être réalisés, comme le mur d’escalade. Mais on n’en parle même plus : il y a moyen de faire tellement de choses dans cette cour ! Le parcours pieds-nus en maternelle est très apprécié… Je ne peux dire que du bien des cours que nous avons aujourd’hui !

De quelle manière les nouvelles cours ont changé l’organisation du périscolaire ?

Avec les nouvelles cours, les adultes s’y retrouvent aussi. Avant c’était surtout de la surveillance. Maintenant, les adultes peuvent s’asseoir avec les enfants pendant leurs activités, il y a des espaces adaptés pour cela. Cela donne plus d’idées aux animateurs. On sort facilement un bac de coloriage, on n’a plus besoin d’être en intérieur pour cela.

Grâce au plateau sportif, les activités physiques sont plus cadrées. Avant, quand on était tous dans la cour, il fallait se battre pour créer un espace pour les ballons. Je peux dire que notre organisation est plus facile qu’avant. En revanche la vigilance peut être un peu accrue : il y a beaucoup d’éléments au sol, les enfants aiment parfois se cacher…

L’espace jardin a été bien investi, tant par les enseignants que par le personnel périscolaire. Trois ATSEM ont été moteurs pour investir cette nouvelle activité du jardinage. Nous avons aussi eu la chance de bénéficier d’un petit budget pour acheter du matériel de jardin, ce qui aide encore les animateurs à s’investir. Pour gérer la dizaine de carrés potagers, ils sont à présent bien équipés, pour les adultes comme pour les enfants. Ils ont des brouettes, des rangements. Le jardin donne envie d’y aller !

Au niveau des enfants, qu’est-ce qui a changé ?

On a l’impression que les enfants arrivent mieux à s’amuser, car il y a beaucoup plus de choses à faire qu’avant. Depuis l’année dernière, on a un peu moins de souci de comportement dans la cour, j’ai moins de retours sur des bagarres, des tensions ou des dégradations, je pense qu’il y a un lien avec la transformation de la cour. Ce qui est important aussi, naturellement, c’est l’équipe, qui fait un super travail. Les enfants sont très demandeurs de toutes les activités que l’on propose, physiques en particulier. Il y a toujours du monde pour participer aux activités !

Les enfants de la maternelle utilisent plus les vélos qu’avant, le traçage leur permet de s’épanouir librement dans l’espace de la cour. Ils s’approprient bien les différentes structures, ils se répartissent bien dans l’espace, ils peuvent s’asseoir plus facilement.

Les enfants aiment beaucoup jouer avec les feuilles d’automne !

Les élèves disposent de nombreux endroits pour s’asseoir, se reposer, jouer librement. L’amphithéâtre sert aussi à l’occasion de lieu d’exposition.

Est-ce que les enfants passent plus de temps dehors à présent ?

Ils passaient déjà beaucoup de temps dehors, pour le goûter, pour les jeux de craie, mais on manquait de lieux pour s’asseoir. Tout le bricolage, la peinture, ils peuvent maintenant le faire dehors. On utilise clairement plus l’espace extérieur.

Quoi qu’il arrive, il faut que les enfants puissent sortir, aller s’aérer, décompresser, 5 à 10 minutes au minimum, même quand il ne fait pas beau. Les feuilles entrent parfois dans les bâtiments, mais ça va. On n’a pas vraiment de problèmes avec la boue.

Vue d’ensemble de la cour de l’école élémentaire. Des pièces d’échiquier géantes sont sorties par les animateurs pour jouer aux échecs.

Pour finir, que souhaiteriez-vous transmettre à vos collègues qui découvrent la démarche OASIS dans leur propre école ?

C’est une chance de pouvoir visiter une école avant de commencer la concertation. Pour notre école, cela nous a permis de voir un peu comment on pouvait créer des espaces. Il est important de bien échanger avec les directions d’écoles, de partager ses idées, de les regrouper et de travailler tous ensemble, car on peut avoir des besoins différents. Ecouter les avis des enfants nous a aussi permis d’avoir d’autres idées. On nous a apporté tellement de choix d’idées, on aurait pu remplir la cour entière ! Donc il faut faire des choix, bien s’approprier sa cour, car chacune est différente.

Si des RPS d’autres écoles ont envie de venir voir et discuter avec nous, ce sera avec plaisir !